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Le film L'image manquante (Rithy Panh, 2013) puise dans la tradition d'un topique dont l'origine est à chercher dans la littérature autour de la Shoah, à savoir : le non-représentable. Cependant, dans le cas du génocide cambodgien, les images existantes se caractérisent, plus que dans d'autres exemples, par leur pénurie. Prenant en considération les images dont on s'est servi pour représenter ce génocide, cet article propose de les regrouper en quatre catégories en raison de leur énonciation, et ceci comme point de départ pour procéder à une analyse des stratégies visuelles utilisées par le réalisateur dans ce documentaire. Ayant recours à une imagerie non-réaliste basée sur des figurines d'argile placées dans une sorte de diorama, alors qu'une voix over hypnotique évoque les expériences traumatiques de l'auteur, Panh introduit un effet d'extranéité qui paradoxalement donne à la scène un intense ton émotionnel. Dans cette perspective, l'article s'attaque à une analyse en détail de trois séquences prenant en compte iconographie, montage et usage des images d'archives. Leur articulation constitue une quête originale d'un vocabulaire visuel et narratif capables à la fois d'échapper aux clichés et d'oeuvrer comme exorcisme à l'égard du trauma personnel. Rithy Panh's The Missing Picture (2013) delves into a long-tradition conceit which originated in the Holocaust bibliography, that is: the non-representable. However, unlike the Holocaust, in the Cambodian case the images representing the genocide are even more scarce. Taking into consideration the pictures that have been used over the years to embody the genocide, this article proposes four categories of them according to their enunciation. Later, it interrogates the visual strategies used by the filmmaker in the said documentary. Recurring to an un-realistic imagery based on hand-carved clay figurines placed in a diorama-like setting and to a first-person hypnotic voiceover, Panh introduces an estrangement that paradoxically imbues the narrative with an emotional tone. From such a perspective, the article proceeds to a close analysis of three sequences, focusing on iconography, editing and use of footage. The articulation of all of them constitutes an original search of a visual and narrative lexicon destined both to escape from the clichés and to perform an exorcism from personal traumatic experience.
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